Histoires du futur du bassin du Congo

Illustration par Edwin Njini Yuh
Illustration par Edwin Njini Yuh

La littérature peut-elle changer l’avenir de notre planète ? Nsah Mala le pense. Il présente cinq nouvelles écrites dans le cadre de deux ateliers de prospective organisés à Yaoundé, au Cameroun, en septembre 2024.

La deuxième plus grande forêt tropicale humide du monde se trouve dans le bassin du Congo, en Afrique centrale.

Et le bassin du Congo est en grand danger !

Guerres pour des minerais essentiels. Agriculture commerciale et exploitation forestière. Développement des infrastructures. Croissance démographique et urbanisation. Changement climatique et trafic d’animaux sauvages…

Ces facteurs, parmi tant d’autres, mettent en péril le bassin du Congo.

La littérature pour sauver le bassin du Congo

En 2022, j’ai soutenu une thèse de doctorat plusieurs fois primée à l’Université d’Aarhus, au Danemark, sur le bassin du Congo. Ma thèse a notamment remporté le prestigieux Prix de thèses francophones en prospective de la Fondation 2100 (France) et de l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) en 2022. Dans cette thèse, j’ai examiné comment les textes littéraires (pièces de théâtre, poèmes et romans) peuvent contribuer à sauver le bassin du Congo.

Les visions – tant dystopiques qu’utopiques – présentes dans les textes littéraires que j’ai étudiés ont été imaginées pour la plupart par des auteurs ou des écrivains individuels.

Approches participatives

J’ai donc pris conscience de la nécessité d’adopter des approches participatives pour concevoir des visions collectives pour le bassin du Congo. Mais comment y parvenir ? C’est ici que deux sources de financement sont intervenues.

Tout d’abord, la School of International Futures (SOIF) m’a décerné sa très prestigieuse bourse Next Generation Foresight Practitioner (NGFP) Fellowship en 2023, dans la catégorie « Choix du jury ». Grâce au financement de la SOIF et du NGFP, j’ai commencé à animer des ateliers participatifs en ligne sur l’avenir du bassin du Congo (#CongoBasinFutures).

Comme je m’y attendais, les ateliers en ligne n’ont pas été très efficaces. La participation a été assez timide ! Cela s’explique principalement par les coupures de courant fréquentes et la connexion internet peu fiable de la plupart des participants du bassin du Congo, notamment du Cameroun. Parallèlement, un atelier de prospective sur le bassin du Congo que j’avais animé en mai 2024 à Leyde, aux Pays-Bas, lors d’une conférence intitulée « And Then What ? From Narratives and Scenarios to Climate Action » avec des Européens non-résidents du bassin du Congo, a été très intéressant et instructif.

Nécessité d’organiser des ateliers sur place

Il est donc apparu clairement que je devais organiser des ateliers sur place dans au moins un des six pays du bassin du Congo (Cameroun, République centrafricaine, Congo-Brazzaville, République démocratique du Congo et Guinée équatoriale). Étant donné que la plupart des participants aux ateliers en ligne (via WhatsApp et Zoom) étaient originaires du Cameroun, le choix s’est imposé de lui-même.

Mais où trouver les fonds nécessaires pour financer ces ateliers sur place ?

J’ai ensuite contacté l’Université de Cologne (Allemagne), où je suis coordinateur du Pôle thématique sur le bien-être planétaire au sein de la Coalition UNESCO-MOST BRIDGES. J’ai aussi obtenu un financement compétitif et généreux du Seed Funding pour la candidature de l’université de Cologne à un cluster d’excellence appelé Sharing a Planet in Peril (SAPP).

Grâce au financement de la SOIF par l’intermédiaire du NGFP et de l’université de Cologne par l’intermédiaire du SAPP, j’ai pu organiser des ateliers participatifs de prospective sur #CongoBasinFutures et #RoyalAnimalsFutures à Yaoundé, au Cameroun, le samedi 7 septembre 2024.

Dystopie et utopie

Au cours de ces ateliers, nous avons utilisé des approches prospectives et de réflexion sur l’avenir pour explorer les futurs indésirables (dystopiques) et souhaitables (utopiques) pour le bassin du Congo.

Parmi les participants à l’atelier de Yaoundé figuraient notamment des écrivains, des cinéastes, des journalistes, des environnementalistes, des enseignants, des étudiants, des agents de sécurité, des professionnels de la santé, des décideurs politiques locaux et des chefs traditionnels autochtones (rois ou fons).

La présence des rois (Fons) d’Ajung, Din, Oku et Mbessa, ainsi que le soutien moral des chefs/rois du Nord-Ouest au sein de l’Assemblée régionale du Nord-Ouest (NWRA) ont revêtu une importance particulière. Grâce à leur présence, nous avons pu explorer une question très sensible liée à la biodiversité dans les royaumes indigènes des prairies du Cameroun (fondoms) : l’utilisation de certains animaux spéciaux comme animaux royaux et sacrés. La plupart de ces animaux royaux, qui comprennent les éléphants, les guépards, les léopards, les tigres, les lions, les touracos de Bannerman, les cauris, les porcs-épics, etc., sont soit en voie d’extinction, soit gravement menacés.

En conséquence, l’atelier #RoyalAnimalsFutures a utilisé des méthodes prospectives pour explorer les moyens de protéger ces animaux royaux pour les générations actuelles et futures.

Les conclusions et recommandations de l’atelier #RoyalAnimalsFutures seront publiées dans un article évalué par les pairs. D’autres pistes sont explorées pour diffuser ces conclusions et recommandations, notamment en les partageant avec les décideurs politiques locaux et nationaux concernés au Cameroun.

Récist et nouvelles

Parallèlement, des ateliers en ligne et sur place ont encouragé les écrivains participants à s’inspirer des visions d’avenir conçues collectivement pour écrire des nouvelles, comme artefacts du futur du bassin du Congo. D’autres idées et recommandations issues de #CongoBasinFutures seront publiées dans un rapport prospectif distinct.

Cela dit, je suis très heureux de vous présenter cinq magnifiques histoires du futur issues du bassin du Congo. Stanislaus Fomutar a écrit trois histoires en anglais. Lapeube Palou Absolo a écrit une histoire en français . Absolo a aussi écrit deux poèmes en français, et les versions anglaise et française de ses poèmes seront publiées avec d’autres poèmes dans un recueil bilingue que je suis en train d’éditer : Congo Basin Poetry Anthology -Anthologie poétique du Bassin du Congo. Stanislaus Fomutar et Lapeube Palou Absolo ont participé activement aux ateliers en ligne et sur place. Curtis Kack, qui a pris une part active aux ateliers sur place, a écrit une histoire en anglais.

Les cinq récits intéressants que vous lirez ici dépeignent à la fois des visions dystopiques (indésirables) et utopiques (souhaitables) de l’avenir du bassin du Congo, en mettant davantage l’accent sur le Cameroun, pour des raisons évidentes. Les ateliers sur place ont eu lieu à Yaoundé, au Cameroun, et les trois auteurs présentés ici sont tous camerounais.

Espoir et désespoir

Comme le suggèrent les récits désespérés de Kack et Absolo, si rien n’est fait pour protéger le bassin du Congo dès maintenant, la déforestation continue entraînera des sécheresses dévastatrices dans le sud du Cameroun. Elle aggravera aussi la désertification dans le nord du pays.

Heureusement, les récits de Fomutar sont plus porteurs d’espoir que de désespoir. Ses récits alternent entre désespoir et espoir, ce dernier triomphant dans toutes les situations, parfois après de longues périodes de calamités. Dans l’un d’eux, le Fon (roi) et sa communauté se réconcilient avec la nature après une relation initialement insoutenable. Dans un autre, la mauvaise gestion des déchets dans certains bus publics et dans les rues du Cameroun est transformée grâce à une gestion durable. Un autre encore met en scène une créature multispécifique qui facilite la communication entre les humains et le reste de la nature.

Sans plus attendre, je vous laisse plonger dans l’avenir du bassin du Congo et du Cameroun à travers ces récits. Pendant que vous apprécierez votre lecture, je vous invite à réfléchir et à élaborer des stratégies sur ce qui devrait être fait pour sauver le bassin du Congo ! N’hésitez pas à partager vos réflexions, vos stratégies, vos visions, vos récits, vos poèmes et autres contributions pour le bassin du Congo en utilisant le hashtag #CongoBasinFutures. Bonne lecture !

Nsah Mala

Ce texte a été publié par Next Generation Foresight Practitionners. L’en-tête et les sous-titres ont été ajoutés par Afriscitech. Il a été traduit en français par Afriscitech.

Les nouvelles seront disponibles sur Afriscitech dans les toutes prochaines semaines.

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