Langue de l’abîme

illustration par Edwin Njini Yuh
illustration par Edwin Njini Yuh

Un agriculteur en détresse est au cœur de la quatrième nouvelle de l’avenir du bassin du Congo

Manaouda se réveilla ce jour-là d’un sommeil d’aplomb qui ne lui avait pas permis de fermer les yeux, réduit à réfléchir sur les stratégies qu’il fallait cuisiner pour pouvoir gagner la pitance du lendemain. À cela s’ajoutaient d’autres non moins importantes tâches les unes que les autres comme : s’occuper de ses enfants, nourrir sa famille, assumer ses responsabilités. Issu d’une famille d’une moyenne classe dont il est l’aîné, il avait été contraint de quitter le banc de l’école pour pouvoir faire valoir son droit d’aînesse au risque d’en être défait au profit d’un frère plus riche. Manaouda avait beaucoup à faire avec des frères et sœurs dont il devait dument s’occuper. Il devait tout faire. Les choses se passent ainsi en Afrique. Il avait pour cela diversifié ses sources de revenu. Il faisait principalement de l’élevage, faisait les travaux de la terre en saison de pluie et se débrouillait avec la mototaxi les heures tardives quand il fallait s’offrir à morphée. Il n’avait pas de repos. Mais il s’en sortait tout de même. Manaouda répondait à tous les appels de la famille. Il honorait ses responsabilités. Mais à quel prix ? Dans tous les cas, peu importait celui qu’on appelait désormais papa.

Accueillir l’aurore avec des jambes aussi extenuées que métamorphosées se révélait être l’une des rares expériences qu’il avait connues. Mais il essaya de se lever, à la réponse d’une cloche dont il venait d’entendre la tonitruance qui probablement venait d’une église d’à côté. Les prières, désormais, pullulaient toutes les aubes pour des raisons que les habitants de la ville connaissaient. Les baffles s’ouvraient la gorge dans les haut-lieux des nombreuses mosquées de la ville. Ils n’en pouvaient plus. Seule l’invocation du très haut pouvait les délivrer de ces malheurs et les sortir de cette grande nuit. Plusieurs familles pratiquaient l’actuphobie, car à la télévision, rien d’enchantant ne se disait plus. Si avant, la télé divertissait par des films et des émissions ludiques ou des informations ayant trait aux opportunités, cette-fois elle était devenue un instrument de torture psychologique. Manaouda y jetait quand même un coup d’œil quand le courant faisait des sporadiques rentrées. Quand les nouvelles ne tournaient pas autour d’un suicide, d’assassinat d’une mère par son enfant ou d’emprisonnement d’un citoyen, elles rodaient autour d’un détournement de fonds publics que peu de journaux reléguaient. Elles faisaient aussi écho d’une vague de morts dont les origines se situaient dans la crise alimentaire, la chaleur, les guerres autour des ressources et dont l’ampleur n’avait rien à puiser du génocide rwandais pour effrayer. 

Manaouda, sous le coup de la stupéfaction, se demanda bien si ce qui arrivait à ses jambes en coton n’était pas corolaire à ces contingences. Était-il à sa fin lui aussi ? Il pensait aussi bien aux multiples tâches qu’il accomplissait par les contraintes du temps qu’à la vieillesse dont il était pourtant loin d’être militant. Soudain, sa fille Madjolé, fit son entrée après avoir imprimé la porte de quelques légers sons des poignets. Elle s’assit sur la natte une fois qu’elle se fit entrer, maniant ainsi avec pâleur, tour à tour, les fourmis en entente d’éloges funèbres. Il y en avait qui, visiblement, attendaient en élançant leurs antennes, à la recherche des minables nourritures. D’autres qui pleurnichaient suite à l’abime qui tenaillait le monde plus que ne s’en préoccupaient les hommes. Autant les fourmis périssaient autant les hommes mourraient. La chaleur avait atteint son paroxysme. Temps de guerre ! Comme à l’accoutumée, Manaouda et sa fille balayèrent les situations globales de la famille. Mais aucune grande inquiétude ne profilait à l’horizon s’il ne fallait considérer le mauvais temps qu’ils vivaient et qu’ils avaient appris à intégrer dans leurs habitudes. Et donc, il n’y avait rien à signaler à part le souhait de pouvoir s’adapter. Manaouda s’était acquitté de tous ses devoirs. Mais tenez, la tristesse qui semblait avoir envahi la gorge de sa fille l’interpella. Il ne put résister à l’envie d’en savoir davantage. Mains sous le menton, elle dit en tournoyant sa tête pour traduire ce que ne pouvait imaginer son père assis sur l’immense canapé trempé par la marée de sueur matinale, le pouf entre les jambes, qu’elle venait encore d’échouer le concours de police.

Manaouda était submergé par le désespoir, le doute et le sentiment de déception qu’il en resta pantois, coît et taciturne. Il avait pourtant nourri l’espérance que cette fois-là l’hameçon allait prendre le poisson. Il croyait que la vie allait mettre la poudre de sourire dans la bouche de la famille après des années d’efforts régulièrement happés. Il fallait encore essayer et essayer jusqu’à écœurement.

Il enveloppa son visage par les paumes pour maquiller son anxiété face à une fille en besoin de consolation. Devoir d’un père. Tête plongée par la suite, révélant des pathologies de désolation. Il était submergé de chagrin non parce qu’elle avait échoué mais bien plus parce qu’ils avaient mobilisé les minimes ressources qu’ils disposaient. Il fit par tous les moyens pour héberger sa colère dans son cœur. Mais c’était ignorer le pouvoir de nuisance d’une frustration accumulée. Elle est semblable à une bombe qu’on ne peut désactiver et finit par faire de nombreuses victimes dont la guerre à l’Est du Congo est de près l’archétype. Il traduit son regret pour finir par chuchoter au plus profond de lui.

Cette phrase sur son visage n’échappa pas à la vigilance de sa fille dont le regard dispersé allait cogner en même temps les photos de sa mère, placardées au mur blanchi à la chaux, les écriteaux de protection de l’environnement inscrits au-dessus du poste téléviseur. Ses yeux ronds et trempés par une marre de larmes virèrent vers une machine traditionnelle de couture, reposant à côté d’un pot d’une veille fleur. Mais cette réaction retint l’attention de sa fille quand celle-ci souleva sa tête, tout en faisant valdinguer les filets des larmes qui envahissaient son fin et triste visage d’enfant.

À peine avait-il fini d’invoquer la Sainte Trinité de lui venir en aide face à ces avenirs incertains, que sa femme l’interpella de la porte d’une voix à pourfendre une tôle à la manière d’une foudre. Elle tenait entre ses mains la bassine maculée d’une débauche de couleur, de laquelle suintaient, à rythme régulier, des gouttes de bouillie de mil rouges destinées aux chèvres. Elle ne fit pas attention au climat triste qui avait pris en otage tout le ciel du salon, dévisageant un journal sur la table dont elle ignorait la provenance, sur laquelle elle pouvait quand même lire :

« Les inondations dans le Mayo-Danay font 11 morts, 198 378 sinistrées, 103 000 maisons détruites, 185 écoles primaires et 13 établissement secondaires inondés. »

« La mort de 40 enfants dans un kamikaze à l’Extrême-Nord. »

« La France au secours de l’Etat camerounais. »

La tristesse était le marqueur du temps. Heureux étaient ceux qui ne cherchaient pas à en savoir plus. Malheur aux curieux. Il ne suffisait que d’ouvrir un bout de papier arraché entre les dents de l’ouragan pour se heurter aux mauvaises nouvelles. Mais, ce journal, ce n’était pas l’affaire de sa femme. Son affaire, c’était vendre ses beignets. Faire son champ. Aider son mari. S’occuper de sa famille. Elle fourra donc sa tête à l’intérieur et dit à son mari : « Mon époux ! Tu peux venir ? Il y a quelque chose à l’entrée. Je ne sais pas ce qui s’est passé. C’est seulement la sorcellerie. »

Il n’eut pas le temps de conclure qu’il sortit aussitôt pour suivre les pas de son épouse, balayant du revers de la main les traditionnelles salutations du voisinage qui fusaient de gauche à droite. Il traversa les caniveaux qu’on aurait dit qu’il n’en existait, envahis par des tas d’ordures et des plastiques épars. Il finit par prendre le couloir qui devait le mener au plus vite à sa ferme. Rien ne courrait la rue qui, désormais plus que par le passé, était orpheline des passants. Par manque de pluie, les vendeurs de mandawa qui brodaient la ruelle de leurs marchandises avaient été congédiés. Les ministères du Soya étaient en arrêt d’activités. Il n’y avait plus d’animaux pour faire tourner les roues du ministère. Les bétails périssaient et les chiens survivants avaient vraiment de quoi bourrer la panse. Les rares benskiners appelaient en vain les clients qui partaient dans les directions différentes, tâtant le sol vierge de pluie. Les plateaux que portaient des ambulanciers étaient vides d’articles. A l’intérieur des cagoules et des hidjabs, les habitants ruminaient, se déshabillaient et parlaient seuls sur des sujets inaudibles comme des fous.

En file indienne, ils continuèrent de marcher, mines embaumées d’anxiété. Une vague d’odeur ocre des bêtes massacrées et de cadavre de flaque d’eau, dont il ne savait l’exacte provenance, dévalèrent ses narines qu’il eut à l’instant des envies à cracher. Il se précipita pour savoir de quoi il s’agissait. En prenant le couloir qui les conduisait à la ferme, il essaya de dissiper les incertitudes qui l’étranglaient à l’idée de perdre le reste de ses richesses, à la vue de chaines de vols qui déferlaient. « Seigneur, que ce à quoi je pense ne soit point une réalité ! », dit-il avec le cœur à l’ouvrage. À son arrivée, il fut surpris par un triste accueil auquel il n’était guère habitué. Ses chèvres ne l’accueillirent pas. Il avait à cet instant des pas nourris par la curiosité. Il se précipita et fit le triste constat de l’état putréfactif du reste de sa ferme. Il ouvrit précipitamment le grillage qui servait d’enclos et balaya tout le dortoir du regard, partant du compartiment des moutons, à celui des chèvres et en passant par les bœufs. Il avait savamment investi et organisé sa ferme d’un tact qui ne disait pas son nom. A la sortie de sa formation à l’école normale supérieure, ne sachant nulle part où s’insérer, il avait entrepris mettre sur pied un projet d’élevage. Il mobilisa les fonds qui lui permettraient de le réaliser.

Manaouda fit le tour de toute la ferme, en regardant avec tristesse et à tour de rôle, les moutons agonisant à faire larmoyer. Certains étaient dans les bras éternels de Morphée et enveloppés dans des linceuls colorés. Quelques-uns mâchouillant les nourritures de la veille au rythme du deuil de leurs compagnons étalés les longs des quatre couloirs. Il se rendit par la suite, dans le compartiment des chèvres où deux survivantes aspergeaient de leur salive, celles qui n’avaient plus la vie. Dans la case des bœufs, aucun survivant n’y était. Une tête essayait tant bien que mal de ressembler les restes de la vie éparpillées entre ses pattes. Sa femme avec des yeux complément trempés le fixait et tenait son cœur par la main au cas où il adviendrait un scandale. Elle le suivit et l’aida à collecter les cadavres acquis au prix d’efforts.

« Que va-t-on en faire ? », posa-t-elle comme question d’une voix fuyante.

Question à l’abonné absent. Il n’avait rien à faire des interrogations comme celles-là. Il fallait faire le deuil. Dans son esprit, plusieurs images faufilaient et des idées se créaient. Tantôt sa mémoire, désormais fer en plastique lui disait : « Il faut pouvoir se passer des évènements de la vie. » Être stoïque malgré les drames et circonstances. Tantôt, il sentait retentir au plus profond de son cœur :  « La vie ne sert à rien. Il faut savoir lâcher prise. Quitter les choses avant qu’elles ne te quittent. » Stoïque de quoi ? C’est une illusion. C’est pour les philosophes et les écrivains qui voient par exemple le bassin du Congo voltiger en morceaux de brumes mais continuent quand même d’en faire un merveilleux portait.

Il lui vint à l’esprit de faire appel à un vétérinaire pour identifier les sources du problème. Cela ne pouvait pas passer sans que les enquêtes ne soient menées. Un personnel arriva vêtu de sa blouse d’un blanc sombre. Il passa d’un compartiment à un autre, en tâtant les organes génitaux de chaque animal et piaffait à chaque fois qu’il soulevait la tête.  Mr Aminou, chef vétérinaire au centre de Louggeo laissait s’entasser toutes les questions que lui posait Manaouda. Cela faisait planer davantage des doutes. Il n’était pas Jésus pour redonner la vie. Apres avoir fini d’inspecter tout le lieu, il enleva son masque pour lui livrer les résultats de l’autopsie.

« Monsieur, nous avons fait le tour de toute la ferme et j’ai constaté avec vous ce que vous avez constaté. C’est alarmant et démotivant à la limite. Mais on peut tout perdre en un claquement de doigt. En fait, tous ces animaux ont péri sous le coup de l’étouffement. Ils ont mangé une nourriture inappropriée parce que vous savez tout comme les humains, les animaux doivent manger sain. Donc, la nourriture que vous leur avez donnée hier était empoisonnée. En plus, ils ne buvaient pas assez d’eau comme il le fallait. »

Mais Manaouda avait fait un puits personnel au sein de sa cage pour résorber le problème d’eau que connaissait tout son quartier. La rivière que partageaient les populations s’était entièrement asséchée et le filet d’hommes qui s’y drainait ne pouvait en finir que par l’intervention des forces d’intervention pour matraquer ceux qui mobilisaient la force afin d’avoir accès aux précieux sésames. Il creusa sa réserve d’eau uniquement pour son activité d’élevage. Mais c’était trop naïf de penser qu’il n’allait pas finir par subir les mêmes représailles générales dont toute la ville était victime. L’eau se faisait rare et il fallait faire preuve de parcimonie pour assurer le lendemain.

« Seigneur ! Je ne comprends rien. C’est pourtant la même nourriture qu’ils ont toujours mangée sans que rien ne leur arrive. Et on s’est toujours assuré dans la famille que tout soit propre jusqu’aux assiettes dans lesquelles ils mangent. Avant on pouvait leur donner de l’eau trois fois par jour. Mais avec la crise d’eau dans laquelle nous sommes aujourd’hui au point où les hommes ne savent où s’hydrater, il faut reconnaitre qu’il était difficile de continuer dans la même logique. »

Reconnaissant sa vulnérabilité et la peine qu’il vivait, le vétérinaire ne manqua de volonté pour le réconforter, en lui faisant un cours de développement personnel.

« Vous savez que tout ne marche toujours pas comme on le souhaite. Toute chose comporte son contraire. On vit aujourd’hui, on meurt demain. C’est un peu comme ça. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il est fortement probable qu’ils aient mangé les feuilles de Niébé qui ont été pompées 30 minutes avant qu’elles ne soient coupées et vendues sur le marché. Alors qu’il est conseillé d’y toucher après une journée entière. Apres les avoir mangés, tous ces animaux ont été touché au niveau des intestins qui n’ont pas immédiatement tardé à pourrir. »

Manaouda se fourra un doigt dans la bouche pour étouffer le souffle de désolation et de déception qui forçaient à s’échapper. À côté, sa femme essayait de le retenir en lui adressant des paroles d’invitation à la prière. C’est Dieu qui fait tout. S’il est capable de reprendre l’homme par la mort, il en était de même pour les animaux que l’homme a toujours considéré comme une proie.

« Si on avait été informé à temps, on aurait pu difficilement récupérer quelques-uns. L’insecticide est très dangereux. Il détruit d’ailleurs les herbes et rend le sol infertile. Ça tue à petit feu. C’est ce que les agriculteurs utilisent plus aujourd’hui. Toutes nos terres sont désormais castrées et les produits agricoles infectés. Il faut aussi faire attention aux engrais qui donnent la fausse illusion de production. »

À peine avaient-ils fini d’inspecter les lieux que le ronflement strident d’un engin se tut à l’entrée de la ferme. Les plis ridés sur le visage surprenant de Manaouda indiquaient son incertitude. Jamais il n’aurait imaginé ou accepté qu’on l’eut dit de croire qu’un individu de ce genre se pointerait dans sa concession en un jour aussi obséquieux. Par-delà sa taille qui surplombait les branches du Nimier bordant les limites de sa cage, un homme légèrement vêtu d’un gilet d’un penchant orange fini, suivi d’une fine jeune fille, entrèrent tous deux munis d’un casque blanc. Mais il reconnut directement leurs identités et fit signe à sa femme en lui indiquant avec dédain la direction qu’ils venaient de prendre. Ce n’était certainement pas la première fois ni la dernière. Cela s’observait dans l’assurance visible de leurs pas et l’atmosphère aisée qui se dégageait de leur conversation. Leur faisant face des minutes après, les étrangers n’attendirent rien pour introduire la quintessence de leur visite surprise. L’homme extirpa un carnet de son sac, nota la date et en livra le contenu.

« Bonjour. Moi c’est Ahmadou percepteur d’impôts de la commune. Elle c’est ma collègue Mefo. Notre passage s’inscrit dans le cadre légal des politiques définies par la loi camerounaise. Toute personne menant une activité a le devoir de contribuer à la fiscalité pour le développement de notre chère république. Désolé pour le dégât que nous constatons mais cela n’engage en rien l’Etat. »

Désemparé, Manaouda ne put dire mot, réduit à picorer ses pensées confuses et éparses. Le vétérinaire toujours présent sur la scène de crime lui prêta main forte en expliquant aux agents ce qui s’était passé et le coup de poing économique que ce monsieur avait pris en pleine figure. La colère qui faufilait dans son regard et la gêne qui dégageait de ses orbites avaient fini par contaminer son humeur qu’il faillit prendre en assaut l’agent qui ne partageait aucunement sa peine. Lui quoi dedans ? Il était là pour son travail et avait des comptes à rendre à sa hiérarchie. Il retorqua donc :

« Je suis venu ici juste pour mon travail. Le reste ne me regarde pas mon grand. Et je n’ai pas toute la journée pour ça. Bougez-vous donc vite sinon je serai obligé de prendre vos coordonnées et répondrez de vos actes devant la justice. »

Sa collègue continuait à griffonner des lignes dans le cahier qu’elle tenait en main sans mot dire. Elle remplissait discrètement des colonnes à un rythme régulier et replongeait sa tête dans ses paperasses de bureaucrate après avoir dévisagé Manaouda tel un médecin. Mefo faisait contracter les tissus de ses narines pour dévier les aromes que dégageait la ferme. Avec un ton dur et déshabillé de toute complaisance, elle apostropha :

« Nous sommes venus percevoir la part de l’Etat. Nous n’avons rien à faire du contexte. Si tout le monde convoque le contexte, sa situation de couple, de famille ou des choses comme ça, de quoi vivra l’Etat ? »

Manaouda était submergé par la perte de ses bétails et harcelé par les agents de l’Etat qui ne faisaient guère de cette circonstance leur tasse de café. « Comment vais-je nourrir mes enfants ? » s’interrogea-t-il. Soudain, Madjolé entra dans la ferme et glissa un papier entre la paume glacée de son père lui chuchotant des mots qu’il ne put comprendre un bout. Il ne résista à l’envie d’en prendre connaissance. Toute la terre s’était liguée contre le fameux personnage. Il dévisagea un avis de coupure d’électricité. Le désormais triste entrepreneur n’avait pas payer sa facture du mois et il fallait bien que l’Etat réclame son investissement bien que Manaouda ait eu droit aux éclats de la lune pendant des jours. Quand l’électricité partait au lever du soleil, il fallait attendre minuit pour apercevoir sa silhouette dans la pénombre de la nuit. Le barrage de lagdo s’était asséché et incapable de supporter toutes les demandes grandissantes.

Un matin à la découverte surprise de son épouse, Manaouda s’en était allé sous le coup de l’issue fatale occasionnant des violents tourbillons qui secouèrent Pitoa deux semaines durant. Il passa de la vie à trépas de suite d’une crise cardiaque.

Lapeube Palou Absolo

Ce texte a été rédigé à l’issue de deux ateliers participatifs de prospective sur #CongoBasinFutures et #RoyalAnimalsFutures à Yaoundé, au Cameroun, le samedi 7 septembre 2024. Il a été édité par Nsah Mala et publié par Next Generation Foresight Practitionners.

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